Le mois de juin en Guinée est consacré depuis un certain temps à la défense des droits des enfants. Plusieurs acteurs de la société œuvrent dans ce cadre. Parmi eux figure en bonne place l’institution dénommée, le parlement des enfants de Guinée. Son rôle, dénoncer les abus exercés sur les touts petits.
C’est pour mieux comprendre cette lutte, que nous avons rencontré il y a quelques jours, Bah Abdourahmane Daîh. Il explique les règles qui régissent le combat qu’il mène au quotidien dans un pays où rien n’est gagné d’avance
Guineeactusociale.com : Présentez-vous s’il vous plait !
Bah Abdourahmane Daîh : Je suis, trésorier du parlement des enfants de Guinée et président de l’ONG Youth alliance Guinée.
Guineeactusociale.com : Dites-nous qui êtes-vous et qu’est-ce que vous faites concrètement au sein du parlement des enfants de Guinée !
Le parlement des enfants de Guinée est une institution pour les enfants qui a vu le jour dès 1990. Cela est dû à la volonté politique que notre pays a réaffirmée en ratifiant la convention relative aux droits de l’enfant. Comme vous le savez, cette convention est ratifiée au niveau international par l’ONU. Notre pays a été 14ème au rang mondial à ratifier cette convention. A la sortie de cette ratification, les autorités d’alors ont décidé de mettre en place une organisation d’enfant, qui n’est composée que d’enfants, qui vont parler spécifiquement des questions liées à l’enfance et qui vont faire des plaidoyers à l’endroit des autorités étatiques, acteurs de la société civile, mais aussi des bailleurs de fonds, pour l’amélioration des conditions de vie des enfants. Ce parlement est composé de 114 députés à l’image de l’assemblée nationale. Géographiquement parlant, à Conakry, sur les 5 communes, vous avez 15 députés, soit 3 par commune et sur l’ensemble du territoire national aussi, les 33 préfectures restantes, vous avez 3 députés par préfecture. Géographiquement tous les enfants de Guinée sont représentés au sein de cette institution.
Lors des sessions parlementaires, chaque enfant, présente les réalités des enfants de sa préfecture autour de la table. Nous essayons d’en discuter. Ensemble en session, nous allons essayer de formuler des séries de plaidoyers à l’endroit des autorités étatiques, mais aussi des communautés, pour que cela change. Avec nous, on va parler d’une version miniature de l’assemblée nationale. C’est pour cela, on nous appelle députés juniors. Alors, nous notre force, ce sont les séries de plaidoyers. Nous menons les activités sur le terrain, mais c’est en rapport avec les organisations de la société civile et l’Etat.
Aujourd’hui, nous sommes beaucoup actifs sur le terrain, notamment pour lutter contre les violences basées sur le genre, les abus, les exploitations et les négligences. Notre bras armé pour lutter contre cela, parce qu’étant des enfants, nous ne pouvons pas directement agir, nous utilisons, la force en rapport avec l’OPROGEM. C’est avec eux nous travaillons pour interdire les mariages précoces, pour interpeller sur les cas de viols et autres. Quand il s’agit de référencement de cas, de prise en charge, là nous interpellons, les autres acteurs notamment UNICEF, SOS village d’enfants et d’autres.
Dans l’année, nous faisons 2 sessions. Il y a les sessions ordinaires et les sessions extraordinaires. Dans l’année, on peut faire plus de 2 sessions. Cela, c’est à des situations d’urgence et c’est seulement le bureau exécutif national composé de 15 députés, qui peuvent siéger. Généralement les sessions se passent à Kindia. Parce qu’il y a beaucoup de complexe hôtelier et c’est un environnement jovial et convivial.
Guineeactusociale.com : Parlant du droit de l’enfant en Guinée aujourd’hui, est-ce qu’en tant qu’acteur vous trouvez qu’il est respecté ?
Vous le savez autant que moi, tout n’est pas rose. Nous sommes dans un pays pauvre, donc la question de protection de l’enfant, le facteur pauvreté pèse beaucoup là-dessus. Parce qu’avec ce facteur, vous voyez des enfants dans les rues entrain de vendre, au lieu d’aller à l’école. Non seulement, l’Etat doit prendre sa responsabilité, en tant que premier acteur de protection. Le deuxième acteur, c’est la communauté et enfin vient les parents. Et si les parents sont excessivement pauvres, les enfants seront obligés de se retrouver dans les rues à mendier ou à faire de petits commerces pour subvenir à leurs besoins. Ce qui les rend plus vulnérables.
Nous autres, ce que nous pouvons faire à ce niveau, c’est d’interpeller les acteurs étatiques, sensibiliser les parents, que ces enfants ne doivent pas rester dans les rues, mais plutôt d’aller à l’école, suivre des cours ; pour que dans le futur, ils puissent devenir des personnes émancipées. Parce que seule à travers l’éducation qu’on peut éradiquer la pauvreté dans notre pays. C’est pour cela qu’à chaque occasion, nous faisons le plaidoyer à l’endroit de l’Etat, d’investir davantage dans l’éducation des enfants.
Mais, il y a des acquis qui sont là. Avant, le code de l’enfant n’existait pas. Aujourd’hui, c’est un instrument juridique qui protège les enfants sur toute l’étendue du territoire national. Avant, il n’y avait pas l’OPROGEM. Donc tous ces acquis, il faut s’en féliciter. Mais ne pas aussi oublier le grand fossé qui existe. Parce qu’actuellement, nous le remarquons avec l’évolution des choses, les enfants guinéens vivent dans une situation catastrophique, malgré les efforts fournis par les acteurs étatiques, les partenaires au développement, mais aussi des organisations de la société civile.
Je le dis souvent dans mes interventions, la Guinée est généralement composée d’analphabète. Quant il s’agit de parler des droits de l’enfant à des personnes qui ne sont pas lettrées, c’est vraiment difficile. Parce qu’ils se disent, que la religion et la coutume priment sur l’enfant. Certains disent que battre un enfant, contribue à son éducation ou à son émancipation. Alors que c’est le contraire ; battre un enfant peut le rendre caduque, il ne comprend rien, il peut même s’habituer à la bastonnade. Ce n’est pas facile, mais avec la volonté que l’on a de changer la société guinéenne, cette motivation nous incarne. J’espère qu’avec votre réseau de journalistes, vous allez faire beaucoup d’activités dans ce cadre, sensibiliser les communautés, ensemble ça va payer.
Guineeactusociale.com : A l’occasion de ce mois dédié à l’enfant guinéen, dites-nous ce que vous faites ou ce que vous prévoyez de faire dans le cadre de ce combat !
C’est un acquis de prendre tout un mois, le consacrer à l’enfance. Généralement, c’est le 16 juin seulement qui est la journée de l’enfant africain et cela c’est pour commémorer la mémoire des camarades Hector Pieterson et Anna Morel, qui ont été abattus par des milices sudafricaines, parce qu’ils protestaient au temps de l’apartheid. Parce qu’en ce temps-là, les enfants noirs n’avaient pas le même droit à l’éducation que les enfants blancs.
Durant ce mois, il y a la direction nationale de l’enfance qui est sous la tutelle du ministère de l’action sociale, qui a une panoplie d’activités. Tous les autres acteurs viennent ajouter leur grain de sel.
Parlant du parlement, comme il est de coutume, à chaque année, nous passons dans les médias pour sensibiliser encore d’avantage. Mon ONG qui est le Youth alliance Guinée, en rapport avec SOS village d’enfants, nous organisons le jeudi 20 à la maison des jeunes, une conférence avec des jeunes et enfants autour du thème national, qui est le mariage d’enfant.
Guineeactusociale.com : En tant qu’acteur, quels appels avez-vous à lancer à l’endroit de l’Etat, des parents, mais aussi de la communauté ?
Le premier appel, il est à l’endroit de l’Etat. La ressource humaine est la clé de tout développement. Aujourd’hui, si ont investi dans le cadre de l’enfance, c’est s’assurer, d’une ressource humaine efficace, dans un avenir proche. Les gens ont tendance à dire l’avenir du pays c’est les jeunes, c’est une grosse erreur, l’avenir du pays c’est les enfants, les jeunes sont le présent. A l’endroit des communautés et des parents, c’est d’encadrer les enfants, parce qu’avant tous, le premier environnement protecteur, c’est la famille et la communauté. Si la famille et la communauté faillissent à son rôle de protéger les enfants, c’est là qu’il revient à l’Etat d’agir. Je vois généralement que chacune de ces trois couches, failli à son rôle et c’est pour cela vous voyez aujourd’hui bon nombre d’enfants prendre leur responsabilité en main à bas âge. Ce qui constitue une violation grave de leur droit. A l’endroit des parents, c’est toujours mieux de continuer à surveiller les enfants. Parce que les enfants sont leurs relèves de demain.
Merci à Vous !!!