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COVID-Vulnérabilité: Déclaration commune de l’ONUDC, de l’OMS, de l’ONUSIDA et du HCDH sur la COVID-19 dans les ‎prisons et d’autres milieux fermés

13 mai 2020 Déclaration

Nous, dirigeants d’institutions qui s’occupent de la santé dans le monde, des droits humains et du développement, faisons cette déclaration commune pour appeler l’attention des dirigeants politiques sur la vulnérabilité particulière des prisonniers et des autres personnes privées de liberté face à la pandémie de COVID-19 et les exhortons à prendre toutes les mesures de santé publique voulues concernant cette population vulnérable qui fait partie de nos communautés.

Sachant que le risque d’introduction de la COVID-19 dans les prisons ou les autres lieux de détention varie d’un pays à l’autre, nous soulignons qu’il faut éviter autant que possible la survenue de la maladie dans ces lieux et garantir que des mesures de prévention adéquates soient appliquées afin d’adopter une approche répondant aux besoins de chaque sexe et d’éviter des flambées de COVID-19 de grande ampleur. Nous soulignons aussi qu’il faut mettre en place un système de coordination actualisé réunissant les secteurs de la santé et de la justice, permettant au personnel pénitentiaire de s’informer et garantissant le respect de tous les droits humains dans les lieux de détention.

Réduction de la surpopulation

Étant donné que de nombreux lieux de détention sont surpeuplés et que la surpopulation nuit à l’hygiène, à la santé, à la sécurité et à la dignité humaine, l’application de mesures sanitaires face à la COVID-19 dans les milieux fermés ne suffit pas. La surpopulation est un obstacle insurmontable lorsqu’il s’agit de prévenir ou de combattre la COVID-19, ou de s’y préparer.

Nous exhortons les dirigeants politiques à envisager, notamment dans les situations de surpopulation carcérale, de n’utiliser la privation de liberté, y compris la détention préventive, qu’en dernier ressort et à s’efforcer de recourir à des mesures non privatives de liberté. À cet égard, il faut envisager des mécanismes permettant de libérer les détenus particulièrement vulnérables face à la COVID-19, comme ceux qui sont âgés ou qui souffrent déjà d’autres pathologies, et les détenus dont la libération ne compromettrait pas la sécurité publique, par exemple ceux condamnés pour des délits mineurs, sans violence, en prêtant une attention particulière aux femmes et aux enfants.

Il est essentiel d’agir rapidement et fermement pour assurer une détention sûre et qui ne nuise pas à la santé et de réduire la surpopulation pour éviter que la COVID-19 n’entre et ne se propage dans les prions et les autres lieux de privation de liberté. Il est capital d’améliorer la propreté et l’hygiène des lieux de privation de liberté pour éviter que le virus n’y entre ou pour limiter sa propagation.

Les centres de détention ou les centres de réadaptation obligatoire, où des personnes soupçonnées de se droguer ou de se prostituer sont détenues de façon arbitraire au motif d’un traitement ou d’une réadaptation, doivent être fermés. Rien ne prouve que ces centres permettent de traiter efficacement la toxicomanie ou de réadapter les personnes, et la détention dans ces lieux pose des problèmes de droits humains, menace la santé des détenus et accroît le risque de flambées de COVID-19.

Garantir la santé, la sécurité et la dignité des personnes

Tous les États sont tenus de garantir en permanence non seulement la sécurité mais aussi la santé et la dignité des personnes privées de liberté et de celles qui travaillent dans les lieux de détention. Cette obligation existe qu’un état d’urgence soit déclaré ou non.

Des conditions décentes de vie et de travail et l’accès gratuit aux services de santé nécessaires sont des éléments intrinsèques de cette obligation. Les personnes privées de liberté ne doivent pas être discriminées en fonction de leur statut juridique ou autre. En prison, les soins de santé, y compris préventifs, curatifs et d’appui, doivent être de la meilleure qualité possible, au moins équivalente à ceux prodigués à l’extérieur. La mise en œuvre des mesures prioritaires actuellement appliquées dans la population générale, par exemple celles relatives à l’hygiène des mains et à la distanciation physique, est souvent extrêmement limitée voire impossible dans les milieux fermés.

Assurer l’accès continu aux services de santé

Les personnes qui présentent des troubles liés à la consommation de substances psychoactives ou qui sont atteintes d’une infection à VIH, de tuberculose ou d’hépatite B ou C sont surreprésentées dans les populations carcérales par rapport à la population générale. En dehors de l’infectiosité normale de la pandémie de COVID-19, le risque de complications de la COVID-19 peut être plus élevé chez les personnes qui présentent des troubles liés à la consommation de substances psychoactives ou qui sont atteintes d’une infection à VIH, d’hépatite ou de tuberculose.

Afin de ne pas perdre le bénéfice des traitements instaurés avant ou pendant l’incarcération, il faut prendre des dispositions, en étroite collaboration avec les autorités de santé publique, pour que les détenus puissent poursuivre leurs traitements sans interruption à tous les stades de la détention et quand ils sont libérés. Les pays doivent adopter une approche des systèmes de santé selon laquelle les prisons ne sont pas séparées du parcours de soins mais intégrées dans les services de santé communautaires.

Il convient donc de renforcer les mesures de prévention et de lutte dans les milieux fermés et d’améliorer l’accès à des services de santé de qualité, y compris l’accès ininterrompu à la prévention et au traitement de l’infection à VIH, de la tuberculose, de l’hépatite et de la dépendance aux opioïdes. Les autorités doivent garantir l’approvisionnement interrompu des prisons et des autres lieux de détention en articles sanitaires, et l’accès à ces articles. Le personnel, les professionnels de la santé et les prestataires de services qui travaillent dans des milieux fermés doivent être reconnus comme personnels essentiels pour la riposte à la pandémie de COVID-19 et recevoir des équipements de protection individuelle appropriés et le soutien nécessaire.

Respect des droits humains

Dans le cadre de la riposte à la COVID-19 dans les milieux fermés, les États doivent respecter les droits humains des personnes privées de liberté. Les restrictions éventuellement imposées doivent être nécessaires, fondées sur des bases factuelles, proportionnées (c’est-à-dire correspondre à l’option la moins restrictive) et non-arbitraires. Les perturbations entraînées par ces mesures doivent être activement atténuées, par exemple en améliorant l’accès aux téléphones et aux moyens de communication numériques si les visites sont limitées. Certains droits fondamentaux des personnes privées de liberté et les protections correspondantes, y compris le droit à la représentation juridique, et l’accès des organes d’inspection externes aux lieux de privation de liberté, doivent continuer à être pleinement respectés.

Respect des règles et des orientations des Nations Unies

Nous exhortons les dirigeants politiques à veiller à ce que les mesures de préparation et de riposte à la COVID-19 dans les milieux fermés soient définies et appliquées conformément aux droits humains fondamentaux, suivent les orientations et les recommandations de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et n’équivalent jamais à la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Dans les prisons, toute intervention doit être conforme à l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela).

Les personnes privées de liberté qui présentent des symptômes de COVID-19 ou qui ont été testées positives doivent être suivies et traitées conformément aux dernières lignes directrices et recommandations de l’OMS. Les prisons et les autres lieux de détention doivent être pris en compte dans les plans nationaux relatifs à la COVID-19, auxquels les populations concernées doivent participer. Tous les cas de COVID-19 survenant dans les milieux fermés doivent être notifiés aux autorités de santé publique responsables, qui les signaleront ensuite aux autorités nationales et internationales.

Conformément à nos mandats, nous restons disponibles pour soutenir l’application rapide des recommandations présentées ci-dessus.

Ghada Fathi Waly, Directrice exécutive de l’ONUDC

Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l’OMS

Winnie Byanyima, Directrice exécutive de l’ONUSIDA

Michelle Bachelet, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme

Nous remercions de PNUD pour ses contributions à cette déclaration.